Les "Burning
Rabbits", ça vous dit quelque chose ? Normalement non, sauf
si vous faites partie d'un groupe de rock craignos homonyme....ou que
vous avez déjà joué à Ginka Fukei Densetsu
Sapphire ! C'est en effet au sein de cette unité spéciale
de police que vous vous retrouverez chaque fois que vous lancerez cet
Arcade CD-ROM. Et en tant que représentant de l'Ordre, c'est
une fois de plus à vous d'aller calmer la racaille à l'autre
bout de l'univers, et même à l'autre bout du temps, puisque
les cinq stages du jeu se déroulent chacun à une époque
différente.
Ce n'est
évidemment pas son principe qui fait de Sapphire un jeu incroyable,
mais bien sûr son extraordinaire -au sens premier du terme- réalisation.
A ce sujet, je ne pense pas me tromper en disant que, techniquement
parlant, c'est le jeu le plus abouti sur PC Engine. Sorti en 1995, Sapphire
symbolise, en quelque sorte, le chant du cygne de la console de NEC.
Exploitant toutes les ressources de la machine et l'indispensable puissance
supplémentaire offerte par l'Arcade Card, jamais, ô grand
jamais, aurions-nous pensé assister à un tel spectacle
sur une bécane datant de 1987. Il faut vraiment le voir pour
le croire.
L'énorme
point fort de Sapphire réside dans l'utilisation intensive d'effets
spéciaux incroyables, ainsi que dans la représentation
"3D" des ennemis. Je m'explique : en fait, certains éléments
du jeu ont été modélisés en Computer Graphics,
puis intégrés dans l'environnement général
(en 2D) du jeu. C'est exactement le même genre de procédé
que celui utilisé dans Donkey Kong Country sur
Super NES, ou Pulstar sur Neo Geo. Ajoutez à cela des
effets de perspective, mosaïques, zooms, morphings... et vous obtenez
un résultat tout bonnement épatant, même si on perd
clairement au niveau de la finesse des graphismes.
L'ajout de
ce genre d'artifices renforce réellement le dynamisme d'un jeu,
notamment lorsqu'il s'agit d'un shoot'em up (rappellez vous d'Alpha
Mission II sur Neo Geo qui, avec ses incessants zooms, en a bluffé
plus d'un). La mise en scène est soignée, et les ennemis
arrivent de partout, dans une diversité de situations assez remarquable.
Les cinq stages étant radicalement différents les uns
des autres,on ne s'ennuie vraiment pas une seconde. Cerise sur le gateau
: le nettoyage intergalactico-temporel pourra, ô joie, se faire
en duo, ce qui est toujours appréciable, et pas si fréquent.
Et comme un bonheur ne vient jamais seul, il est bon de souligner que
le joueur a à sa disposition un choix de quatre vaisseaux, vraiment
différents qui plus est. Pas mal !
Quant aux
musiques, nerveuses et puissantes, elles vous feront vibrer comme à
l'époque de Gate et Winds Of Thunder, même
si elles restent moins efficaces que dans ce dernier.
Alors, Sapphire,
jeu parfait ? Non, loin s'en faut. Deux défauts d'échelle
différente viennent en effet ternir le tableau.
Tout d'abord, les bruitages sont complètement loupés et
crachent comme c'est pas permis ; sans doute parce que toutes les ressources
de la bécane sont monopolisées par les graphismes, animations
et musiques. Le plus dommage, c'est qu'il aurait été tout
à fait possible de rendre ce problème quasi-imperceptible
si le mixage final avait été à la hauteur. Ce n'est
pas le cas, et le volume trop élevé des bruitages par
rapport à celui de la musique oblige le joueur à tendre
l'oreille pour percevoir les orchestrations.
Le second
défaut, bien plus important, concerne la durée de vie.
Le nombre de niveaux restreint et la faible résistance qu'offrent
chacun d'eux (sachant qu'environ 4 bombes suffisent à exterminer
un boss, et que l'on en récupère 2 à chaque vie
perdue, le compte est vite fait) impliquent forcément que l'on
ne va pas mettre des mois à terminer Sapphire. Alors bien sûr,
si l'on se contente des 4 crédits de base, les choses se compliquent
sensiblement, mais qui arrivera à résister à la
tentation de gonfler son nombre de crédits à 9, via le
menu d'options ? Et bah, je vous le donne dans le mille : les gens qui
ont payé près de 2000 F pour s'offrir Sapphire ! Ceux
là n'ont sûrement pas envie de ruiner un quart du SMIC
dans un jeu qu'ils vont finir en deux jours.
Après avoir été un produit de luxe et de désir,
Sapphire est désormais victime de sa hype, la mode étant
aujourd'hui de lui cracher ouvertement dessus, histoire de passer pour
un vrai fan old-school privilégiant le fond à la forme.
Quelle époque formidable...
Donc voilà,
tout à fait objectivement, Sapphire est un jeu superbe, captivant
et dynamique, mais malheureusement très court et très
cher. De ce constat, pas la peine d'être spécialement futé
pour comprendre qu'à moins d'être archi-friqué ou
gaga-collectionneur, se payer ce "bijou" reste du domaine
du doux rêve. Et vu que dans le même genre, il existe à
mon avis des titres nettement meilleurs et pour bien moins cher...
Kabuki