Dans le registre des hardwares "hybrides" développés avec le partenariat d'autres constructeurs en accord avec NEC, on trouve notamment la machine de Pioneer : le LaserActive. Mais contrairement à Sharp avec son X1-Twin ou au PC88 qui n'apportent pas grand chose à part de la curiosité, la machine de Pioneer prône l'évolution technologique et le démontre avec le support LaserDisc. Et quelle évolution ! La quantité d'informations stockable est démultipliée, donnant lieu à des environnements précalculés issus des stations graphiques les plus puissantes du moment ! Mais nous y reviendrons plus tard avec l'analyse des jeux disponibles. Avant ça, un peu d'histoire.
En fait le premier à utiliser le support LaserDisc pour un jeu-vidéo c'est SEGA en 1983 avec Astron Belt. Imaginez le délire dans les salles d'arcade !! A une époque où l'Atari 2600 faisait rage, SEGA arrive avec les jeux du futur, avec "de la réalité virtuelle" comme on aimait en parler dans les années 80. A l'époque le potentiel semblait sans limite vu la quantité astronomique de mémoire disponible grâce à ce support.
Quelques mois plus tard sort le mythique Dragon's Lair, et là c'est la grande claque : un dessin animé interactif sous nos yeux !

Pioneer le détenteur de la fameuse technologie croit beaucoup en son nouveau support. C'est en 1984 (la Famicom vient de sortir... imaginez !!) que Pioneer, à l'ambition folle, propose son lecteur à Microsoft/ASCII pour ses machines MSX. Et voici donc qu'apparaît des lecteurs Pioneer Palcom avec une vingtaine de jeux spécifique MSX avec comme souvent des dessins animés interactifs, grâce à la quantité énorme de mémoire disponible. Quelle évolution par rapport aux jeux de l'époque ! Mais Pioneer veut aller encore plus loin en proposant une sorte d'écran tactile et interactif : le LaserVison.
Mais après plusieurs autres jeux en Arcade, le support ne remporte pas tous les suffrages. Les causes ? Le prix prohibitif des lecteurs de LaserDiscs, la pauvreté du gameplay des jeux proposés et l'arrivée du CD-ROM ont fait disparaître ce support à petit feu.

Qu'à cela ne tienne, Pioneer géant de l'électronique grand-public décide en '93 de s'associer avec NEC et SEGA afin d'ouvrir au plus large public son support, et le vendre dans le maximum de foyers au Japon et aux USA. Pioneer y croit toujours et veut le faire savoir !

Le marketing de l'époque ventait les mérites de cette machine multimédia-ludique-conviale avec la qualité numérique des films, les ludothèques complètes NEC et SEGA compatibles, le module Karaoké, les LaserDiscs éducatifs... Bref la machine idéale pour tout bon père de famille.
La machine sort donc en août 1993 au prix de 89.800 Yens (quand même...) et 39.000 Yens pour chaque module.

Autant vous le dire tout de suite, la machine est magnifique. Imposante et très lourde (près de 8 kg.... merci les frais de port...), la mise sous tension s'accompagne de l'allumage de toutes les petites diodes de couleur en façade, la grande classe, et de l'apparition du menu LaserActive à l'écran, différent selon le module connecté.
Pioneer a décidé de faire de son lecteur un engin haut-de-gamme, ce qui se confirme lorsque l'on jete un oeil à la connectique en face-arrière de l'appareil : multitude de prises cinch classiques et une sortie numérique fibre-optique pour le son ! Carrément.

Le lecteur est accompagné d'une télécommande également très classe, puis viennent les fameux quatre modules. Oui, bien quatre modules différents furent créés pour soutenir le système LaserActive. Et là je dis bravo, coup de génie chez Pioneer (peut être un passionné gamers est à l'origine de l'idée ?!), les modules se pluggent en face-avant de la machine, transformant le lecteur en console de jeux-vidéo dernier cri.
La chose qui est le plus intéressant à mes yeux, c'est que les éditeurs ont joué le jeu à fond et ont développé des jeux spécifiques NEC et SEGA pour le LaserActive ! On trouve donc des jeux Hudson Soft et Taito qui utilisent les capacités de la PC Engine alliées avec le support du LaserDisc, et de même pour la Mega Drive ! C'est pas dingue tout ça ?

Avant de rentrer dans la description des jeux, petit point sur les différents modules :

- Module SEGA : c'est le module le plus facile à trouver, grâce à lui vous pouvez jouer aux jeux MD, Mega-CD, 32X et Mega-LD. Ce module est accompagné de l'équivalent d'une manette Mega Drive 6 boutons avec, l'élégance même, les inscriptions "LaserActive" et "Pioneer" en lettres dorées.

- Module NEC : moins évident à choper. Néanmoins, si vous le trouvez, vous pourrez jouer (accrochez-vous) aux HuCARD Jap' et US, CD-ROM², Super CD-ROM² (la System Card 3.0 est préintégrée), Arcade CD-ROM² (l'achat d'une Arcade Card Duo sera alors nécessaire) et les LD-ROM². Comme pour le module SEGA, ce module NEC s'accompagne d'une manette spécifique au LaserActive. Elle est très proche d'une manette CoreGrafX 2 mais avec les inscriptions "LaserActive" et "Pioneer" en lettres dorées, ce qui fait preuve d'un bon goût certain.

- Module Karaoké : fourni avec un micro (accessoire indispensable pour ce module), il permet de s'exercer dans les vocalises.

- Module PC : très certainement le module le plus rare et le plus difficile à trouver, il permet de relier son LaserActive à son PC grâce à une liaison série RS232 pour télécharger des jeux sur son lecteur, incroyable non ?!

Au niveau des accessoires, il faut noter les fameuses lunettes 3D "Goggles 3D" compatibles avec certains jeux (un adaptateur difficile à trouver est obligatoire pour la connexion sur le module) comme Vajra 2, Virtual Cameraman 2. L'effet est incroyable et accentue encore davantage la puissance et l'impact de la machine par rapport à la concurrence de l'époque.

La machine fut ensuite distribuée aux US, on trouve donc des jeux LD japonais et américains, certains jeux japs n'étant pas disponibles en US. Au passage, il peut être utile de préciser que les jeux possèdent une -grosse- spine card, et qu'une notice est présente à l'intérieur de la pochette.
A noter également qu'il est possible de trouver des LaserDiscs dont la pochette est estampillée "Sample" : toujours sympa à avoir.
Un seul prototype m'est connu : Myst, dont le développement à été abandonné suite à des bugs trop importants au moment de sa commercialisation. Un titre vraiment très dur à dénicher maintenant...

Parlons enfin des jeux :
Il existe 11 jeux LD-ROM² spécifiques NEC et 23 jeux Mega-LD spécifiques au module SEGA.
Sur ces 34 jeux, certains sont sortis sur les deux modules à la fois (Zapping TV Satsui, Pretty Illusion 1&2).
On peut classer les jeux LaserActive en quatre catégories :
- les jeux éducatifs : 3D Museum, I Will The History Of London, Great Pyramid,...
- les jeux à tendance pervers : Virtual Camera 2, Dora Dora Paradise, Dr. Paolo no Tokkeoki Vidéo,...
- les films interactifs : Demons Judgement, Hi-Roller Battle, Blue Chicago Blues, Manhattan Requiem, Zapping TV Satsui (avec des acteurs allemands !).
- et les jeux d'arcade qui représentent environ un tiers des titres sur ce support.

Les jeux des deux premières catégories proposent beaucoup de scènes filmées plus ou moins interactives.
Mais attardons-nous plutôt à la dernière catégorie : les jeux d'arcade de Taito, Hudson Soft et Pioneer. Autant vous le dire tout de suite : c'est la grande claque visuelle !
En fait, il y a deux types de jeux qui ressortent :
- les dessins animés interactifs (Time Gal, Triad Stone, Road Prosecutor)
- les jeux de tirs avec une cible à la Opération Wolf (Vajra 1 et 2, Ghost Rush) ou sous forme de shoot' (Hyperion).
A noter Rocket Coaster qui propose une course futuriste à la F-Zero.

Pour cette dernière catégorie de gameplay, les jeux se composent toujours de la même façon : les sprites gérés par le module Mega Drive ou PC Engine, et les backgrounds décors précalculés tout en 3D avec des effets de caméra ahurissants ! En fait tous les décors ont été générés sur station graphique puis implémentés dans le jeu sous forme de vidéo. Et là c'est méga impressionnant !! Bien sur on est loin des cinématiques de Square, et les textures sont absentes, mais imaginez l'émotion en 1993 à la vision d'un jeu aux décors tout en 3D et super détaillés ! Par exemple, le jeu de course Rocket Coaster propose quatre courses différentes avec des parcours géniaux et magnifiques, le champ de vision est très lointain et m'impressionne encore aujourd'hui. Les shoots à la Vajra proposent des décors urbains avec des caméras dynamiques. Hyperion nous propose des décors dans l'espace avec des champs d'astéroïdes et bases spatiales.
Et pour garnir tout ça, les musiques, digits et bruitages viennent du support LaserDisc, c'est à dire de très haute qualité.
Quelle longueur d'avance sur la concurrence !

Mais bon hélas, tout n'est pas parfait. Le grand bémol reste le faible gameplay des jeux proposés. Très vite lassants, peu maniables, on s'aperçoit vite que les jeux ont juste été créés afin de faire office de vitrine technologique et démontrer ce à quoi les jeux vidéo pourraient ressembler dans les années futures. On est bien loin du gameplay et du fun d'un jeu Nintendo par exemple.
La difficulté est également souvent excessive (je pense à Vajra ou Rocket Coaster). Tout ceci nous fait vite admettre que les jeux ont été réalisés plus pour être admirés que joués.

Pour conclure, je dirais que cette console multimédia est hors-du-commun et se démarque réellement des autres machines de l'époque. Malheureusement il n'est pas aisé de trouver une machine complète et nickelle pour un bon prix. D'autre part, le lecteur est relativement fragile, il arrive d'en trouver pas mal HS et la taille énorme des LaserDiscs les rend encore plus fragiles contre d'éventuelles rayures. On peut enfin noter qu'un modèle de lecteur LaserActive NEC est également sorti, mais il se fait beaucoup plus rare.

_______________________________________________________________________________________________________Thibaut


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